Cette analyse a été réalisée par Diane Quenault de St Sulpice, Directrice de Marché Creditsafe, à partir de l'article de Dominique Strauss-Kahn "L’être, l’avoir et le pouvoir dans la crise" paru le 05 avril 2020 sur le site internet Politique Internationale.
Si la crise actuelle est de prime abord très différente, la vitesse de propagation de cette maladie a joué un rôle. Nous avons basculé du stade "Epidémique" à celui de "Pandémie".
On comprend bien que la mondialisation marquée par l’accélération de la circulation des personnes est au cœur du processus de propagation.
Ce qui a joué également dans le processus de propagation c’est :
Tout est une question de réactivité, c’est-à-dire capable de réorienter son offre et de mobiliser des réserves prédéfinies et recensées. Cette agilité, il semblerait bien qu’elle nous ait fait défaut.
Je profite pour faire un parallèle avec le monde de l’entreprise – si nous transposons cette analyse et retenons les points clés :
Ainsi, de par l’ampleur de la crise sanitaire, nous ne pouvons plus ignorer le caractère global et absolu de cette pandémie.
Pourquoi global ? Par le nombre d’individus confinés qui est deux fois plus important que la population mondiale totale lors de l’épisode de grippe espagnole (1919)
Pourquoi absolu ? Parce qu’aucun individu ne peut se considérer comme étant à l’abri du risque de contamination.
La « valeur » de la vie humaine a considérablement augmenté dans l’inconscient collectif des pays les plus riches. Or aujourd’hui, nous reprenons conscience de la précarité de l’être. Cette crise de l’être aura certainement des conséquences considérables qu’il est peut-être trop tôt pour aborder ici, mais elle est aussi révélatrice d’une crise de l’avoir et d’une crise du pouvoir dont l’analyse est nécessaire pour guider les décisions à prendre.
Et encore une fois, c’est transposable et adaptable à l’échelle de l’Entreprise.
Comme nous venons de le voir, cette crise économique est sans précédent, son caractère systémique lui confère la particularité de mêler un choc sur l’offre et un autre sur la demande.
Nous pouvons difficilement éviter les conséquences en termes d’emplois du choc sur l’offre ET 2020 pourrait voir la consommation et l’investissement se contracter violemment.
Le choc sur la demande a évidemment plusieurs causes qui se cumulent : « mes dépenses sont vos revenus ».
Par conséquent, à court terme, les pertes sont inévitables.
Pourrait-on éviter ces conséquences dramatiques ?
Sans doute pas totalement, mais certainement en partie si nous sommes capables :
Selon l'ancien directeur général du FMI, pour éviter les conséquences sociales et humanitaires de la crise économique qui est d’une ampleur mondiale, il convient de mener les actions monétaires suivantes :
Toutefois, il précise que l’action monétaire a ses limites et par conséquent il est important d’envisager le dispositif de soutien dans sa globalité en soutenant l’appareil productif même si cela génère une hausse des prix pour contrer une capacité de production limitée due au confinement.
Pourquoi ?
« Parce qu’on ne peut soutenir l’offre en ne finançant que l’offre »
Quant aux mesures de soutien de la demande, elles ne pourront s’appliquer que lorsque le confinement sera progressivement levé, pour permettre à la production de repartir.
Comme nous venons de le voir, la réactivité est un facteur de rebond. c’est pourquoi il est nécessaire que les mesures de soutien de la demande soient en œuvre tout de suite et permettre de combattre l’angoisse des consommateurs qui ne peut que les pousser à thésauriser ce qui est l’inverse de ce qui est souhaitable.
La crise sanitaire agit comme un révélateur
En synthèse, ce qu’il nous faut dès maintenant à l’échelle de la nation :
A l’échelle de l’entreprise, c’est disposer d’un dispositif complet pour permettre de résister, préparer et sécuriser le plan de relance de votre entreprise.
«Sortir du confinement pour rebondir »
Toutes les entreprises se préparent mais élaborent-elles une démarche propre pour s’approprier les nouvelles règles du jeu, pour se renouveler et se redonner des perspectives ?
Chaque entreprise travaille sur ses prévisions de trésorerie et considère les options de financement à disposition, mais elles sont moins nombreuses à avoir mis en place un dispositif complet pour sécuriser le cash disponible et dégager des ressources financières.
Les défis du rebond avec comme enjeu, pour les entreprises, la nécessité de disposer et de s’appuyer sur des outils d’analyse adaptés pour comprendre les bouleversements, analyser et agir, mais aussi pour identifier les leviers qui nourriront les succès de demain.
La fragmentation de la mondialisation que la crise a toutes les chances de provoquer constitue une occasion inespérée de reprendre les rênes et de retrouver une vision politique, une indépendance de production dans l’industrie, le numérique, la technologique …..
Il fallait un choc pour que la véritable nature de l’Union ressurgisse ; celle d’un refus d’abandonner des valeurs collectives et un modèle de société qui définissent une identité. C’est cette identité qui s’est fondue dans la mondialisation, c’est elle qui peut renaître de sa fragmentation.
En d’autres termes, non seulement la sortie de crise pourrait marquer un affaiblissement de la légitimité des autorités publiques dans les démocraties, mais en même temps un raffermissement du pouvoir dans les autocraties.
Masi des questions subsistent sur le comment, sans doute entrons nous dans un autre monde.
Une autre économie : le retour des régulations ?
La période actuelle est celle du désordre et la question se pose évidemment de savoir dans quelle direction nous nous orienterons lorsque la crise sanitaire sera jugulée.
Nous connaissons depuis près de deux siècles une succession de phases organiques au cours desquelles un mode d’organisation de l’économie et de la société domine et des phases critiques pendant lesquelles ces régulations s’essoufflent puis s’évanouissent, pour céder la place à d’autres. La dernière grande régulation collective a été celle de l’État providence. Qu’elle se soit épuisée ne fait plus de doute. Et malgré un léger balbutiement au lendemain de la crise des « subprimes », rien n’est venu la remplacer.
Ces régulations n’épargnent aucune des activités humaines, mais au-delà de l’espace classique de la coopération économique, il y a plusieurs domaines où la nécessité de la régulation s’impose comme l’organisation sanitaire.
La crise sanitaire crée peut-être aussi l’opportunité d’une mobilisation nouvelle pour lutter contre le changement climatique, pour préserver l’environnement et en particulier la biodiversité, pour lutter contre la destruction des écosystèmes par la pollution.
Un autre paradigme :
« C’est donc bien une fragmentation de la mondialisation qu’il est raisonnable d’attendre et ce peut être la chance de l’Europe si elle sait se ressaisir »
Pour que le régime de transparence individuelle que l’on pressent ne se transforme pas en société de défiance, les pouvoirs publics se doivent de jouer un rôle actif, opter pour un positionnement public ferme et doit constituer le socle d’un nouveau « système providentiel » sur lequel asseoir une confiance et un pacte citoyen renouvelé.